Son origine remonte à un accident industriel soviétique. En forant pour exploiter du gaz naturel, une équipe russe aurait percé une poche de méthane. Pour éviter une intoxication atmosphérique, la solution fut simple et brutale : allumer un feu censé s’éteindre en quelques jours. Résultat : 54 ans de flammes ininterrompues, visibles autrefois à des kilomètres à la ronde. Ce brasier, mesurant 69 mètres de diamètre et 30 mètres de profondeur, a littéralement injecté dans l’atmosphère des tonnes de gaz carboné et de méthane, sans utilité productive.
Quand la planète reprend l’avantage : vers une extinction contrôlée
Mais aujourd’hui, la donne change. Selon Turkmengas, les récents forages autour du site portent leurs fruits. Des puits de captation ont été rouvert ou creusés, visant à détourner le flux de méthane avant qu’il ne s’échappe dans le cratère. Une stratégie qui semble fonctionner : « La réception de gaz à basse pression et d'eau de formation légèrement gazéifiée à partir de différents puits indique une diminution de la recharge en gaz du cratère », a indiqué la compagnie dans un communiqué relayé par Phonandroid.
Ce tournant environnemental est validé par des données satellitaires issues de la plateforme MARS (Methane Alert and Response System), un programme du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) auquel le Turkménistan participe depuis mars 2024. Pour la première fois depuis plus d’un demi-siècle, les données enregistrent une chute drastique de l’intensité des flammes. Une responsable de Turkmengas, Irina Luryeva, a confirmé au Popular Science : « La réduction du feu a presque triplé.. Actuellement, il reste seulement une faible source de combustion. »
L’approche adoptée n’est pas une simple extinction mécanique. Elle repose sur un assèchement progressif de la poche gazeuse, en interceptant le méthane en amont. Une sorte d’intervention chirurgicale énergétique, discrète mais efficace.
Une planète intoxiquée par ses erreurs… et ses flammes
La Porte de l’Enfer n’est pas une anomalie isolée. Elle appartient à une macabre lignée de brasiers souterrains qui défient les siècles. À Centralia, en Pennsylvanie (États-Unis), un feu de charbon brûle depuis 1962. À Jharia, en Inde, c’est un enfer de cent ans qui ronge les sols.Et en Australie, la “montagne qui brûle” affiche un record terrifiant : 6 000 ans d’embrasement continu. Mais à la différence de ces sites, le cas turkmène incarne une culpabilité géopolitique récente. Pendant des décennies, le cratère a été aussi toléré que caché. Officiellement célébré comme attraction touristique, il était en réalité une aberration climatique.
Le président Serdar Berdymukhamedov avait d’ailleurs donné l’ordre d’en finir avec ce cratère dès janvier 2022, sans effet tangible jusqu’en 2024. Il a fallu l’adhésion du Turkménistan au système MARS pour que des données objectives s’imposent. Aujourd’hui, il ne reste qu’une faible incandescence dans ce trou jadis incandescent. Mais le combat n’est pas terminé. D’autres puits sont en cours de forage. La fermeture définitive dépendra de la capacité du pays à intercepter toutes les remontées de gaz. Le défi est technique, environnemental, mais aussi politique. Combien d’autres “Portes de l’Enfer” restent-elles ouvertes dans le monde, invisibles, tolérées ou simplement ignorées ?
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Source: www.greenetvert.fr