Le Brésil, futur hôte de la COP30 en novembre prochain, est au cœur d’une polémique énergétique majeure. Le pays a autorisé, le 20 octobre 2025, l’entreprise publique Petrobras à lancer une campagne de forage pétrolier dans la Marge équatoriale, au large de l’Amazonie. Cette décision, soutenue par le président Lula, intervient malgré les avertissements d’écologistes et les réserves exprimées par les scientifiques. Elle illustre les tensions profondes entre la promesse d’un Brésil « leader climatique » et son attachement à une industrie pétrolière toujours puissante.
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Un feu vert controversé à quelques semaines de la COP30
Petrobras a annoncé avoir reçu l’autorisation de l’Ibama, l’agence fédérale de surveillance environnementale, pour entamer un forage exploratoire à environ 500 kilomètres de l’embouchure de l’Amazone et 175 kilomètres des côtes brésiliennes. Selon la compagnie, l’opération commencera «immédiatement, pour une durée de cinq mois », avec une sonde déjà sur site, conformément à un communiqué adressé à l’AFP. Le projet vise à déterminer la présence de pétrole et de gaz dans une zone stratégique, potentiellement comparable aux récentes découvertes du Guyana, voisin du Brésil. L’entreprise publique a assuré avoir rempli « toutes les exigences » de l’Ibama et respecter « intégralement le processus de licence environnementale ». L’agence, citée par France Info, a confirmé,avoir délivré cette autorisation « à l’issue d’un rigoureux processus ».
Pourtant, cette décision intervient après un refus catégorique de l’Ibama en 2023, l’institution ayant estimé que Petrobras n’avait pas présenté de garanties suffisantes pour protéger la faune marine en cas d’accident pétrolier. Entre-temps, Lula a fait pression pour que le dossier soit réexaminé. En mai dernier, il avait publiquement reproché à l’Ibama d’agir «comme une agence contre le gouvernement», fragilisant ainsi l’indépendance de l’organisme. Cette intervention directe du président a été perçue comme un signal politique fort en faveur de la production pétrolière, alors même que le Brésil s’apprête à accueillir une conférence mondiale sur le climat.
Lula face à ses contradictions écologiques et économiques
Pour ses détracteurs, cette autorisation symbolise les contradictions d’un président qui se veut à la fois défenseur de la forêt amazonienne et promoteur d’une souveraineté énergétique fondée sur le pétrole. «Cette autorisation est un sabotage de la COP et va à l’encontre du rôle de leader climatique revendiqué par le président Lula sur la scène internationale », a réagi l’Observatoire du climat, un collectif d’ONG environnementales. De son côté, le ministre brésilien de l’Énergie, Alexandre Silveira, défend le projet au nom de la sécurité énergétique nationale : « La Marge équatoriale représente l’avenir de notre souveraineté énergétique. Nous défendons une exploration avec une responsabilité environnementale totale, en accord avec les standards internationaux», a-t-il affirmé dans des propos rapportés par le HuffPost.
Cette position reflète la ligne économique du gouvernement : exploiter les ressources pétrolières pour financer la transition énergétique. Lula lui-même soutient que les revenus du pétrole peuvent servir à développer les énergies renouvelables, secteur dans lequel le Brésil affiche déjà une performance notable. En 2025, 50 % de l’énergie du pays provient de sources renouvelables, un record mondial selon les données officielles. Cependant, les ONG environnementales dénoncent une « erreur historique ». Pour Ilan Zugman, directeur pour l’Amérique latine de l’ONG 350.org, «il est urgent de construire un plan de transition énergétique juste, basé sur les énergies renouvelables, qui respecte les peuples indigènes et autres communautés traditionnelles », peut-on lire dans le quotidien. Ces critiques soulignent l’écart entre les discours du gouvernement et la réalité des choix industriels.
Petrobras, entre stratégie nationale et image internationale
La décision de l’Ibama marque un tournant pour Petrobras, pilier de l’économie brésilienne et symbole de puissance nationale. Avec une production de 3,4 millions de barils par jour en 2024, le Brésil est le huitième producteur mondial de pétrole. La compagnie, récemment secouée par des affaires de corruption, cherche aujourd’hui à redorer son image à travers un discours axé sur la responsabilité environnementale. Selon Petrobras, ce forage n’a pour but que d’obtenir « plus d’informations géologiques » et d’évaluer la viabilité économique de la zone. « Il n’y a pas de production de pétrole à ce stade », précise la société. La présidente de l’entreprise, Magda Chambriard, espère cependant, dans des propos rapportés par the HuffPost « prouver l’existence de pétrole dans la partie brésilienne de cette nouvelle frontière énergétique mondiale ».
L’enjeu économique est considérable : la région de la Marge équatoriale pourrait contenir des gisements équivalents à ceux exploités par le Guyana, devenu en quelques années l’un des pôles pétroliers les plus dynamiques du continent. Mais cette perspective divise profondément. Les scientifiques rappellent que depuis le XIXᵉ siècle, la température moyenne de la Terre a augmenté de 1,1 °C, principalement à cause de la combustion d’énergies fossiles. Poursuivre l’exploration pétrolière, alors que la COP30 vise justement à renforcer les engagements climatiques mondiaux, envoie un signal politique ambigu. Pour certains observateurs, la stratégie de Petrobras, soutenue par l’État, risque de nuire à la crédibilité internationale du Brésil sur les questions climatiques.
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Source: www.greenetvert.fr
