À l’heure où le secteur est encore perçu comme incertain, coûteux et technologiquement immature, BlackRock se positionne en pionnier offensif.
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Eni, le satellite modèle
Pour Eni, cette opération s’inscrit dans une stratégie bien rodée. Depuis plusieurs années, son PDG Claudio Descalzi orchestre une partition subtile, celle du modèle dit « satellite » : détacher les unités bas carbone, y faire entrer du capital externe, tout en conservant les rênes du pilotage stratégique. Ce fut déjà le cas avec Plenitude, la branche dédiée aux énergies renouvelables, dont 20 % ont été cédés en juin à Ares Management pour 2 milliards d’euros. Désormais, c’est Eni CCUS Holding qui change de dimension.
Cette filiale regroupe des projets-clés de captage et stockage du CO₂ : HyNet North West et Bacton Thames NetZero au Royaume-Uni, L10CCS aux Pays-Bas, et potentiellement Ravenna en Italie. Ces infrastructures visent un stockage combiné de plus de 29 millions de tonnes de CO₂ par an d’ici 2030, avec pour projet-phare le cluster HyNet, cœur de la stratégie britannique de captage carbone estimée à 21,7 milliards de livres sterling.
BlackRock's veut devenir le seigneur des infrastructures climatiques
Le choix de GIP, désormais absorbé dans l’écosystème tentaculaire de BlackRock's depuis son rachat en 2024, n’est pas neutre. Contrairement à d’autres prétendants comme Snam ou Macquarie, GIP offre ce que recherche Eni, un partenaire patient, doté d’un ADN d’investisseur d’infrastructure plus que d’un co-actionnaire industriel classique. Avec près de 100 milliards d’euros d’actifs sous gestion depuis sa fusion avec BlackRock, GIP peut garantir un soutien financier stable, à long terme, dans des secteurs à forte inertie comme la CCUS.
Et ce n’est pas un détail. À l’heure où les États-Unis, plongés dans l’incertitude réglementaire depuis le retour de Donald Trump à la présidence, hésitent à soutenir fiscalement le captage de carbone, l’Europe se pose comme terrain d’investissement stratégique pour la finance climato-compatible. Le message sous-jacent ? BlackRock ne veut pas simplement acheter une participation, mais s’ériger en « propriétaire foncier du climat », selon l’expression utilisée en interne pour désigner sa montée en puissance dans les infrastructures bas carbone.
CCUS : d’utopie technologique à réalité financière ?
Le captage, l’utilisation et le stockage du dioxyde de carbone (CCUS) reste un secteur clivant. Trop cher, trop lent, trop flou pour certains. Mais la valorisation posée par GIP à 1 milliard d’euros marque un changement radical de perception. Elle agit comme un point de référence pour une technologie qui, jusqu’ici, peinait à convaincre les grands fonds. Jusqu’à maintenant, les projets CCUS vivaient sous perfusion publique.
Désormais, des poids lourds privés comme BlackRock y voient une classe d’actifs rentable. Si l’accord se concrétise d’ici la fin de l’été, comme prévu, il s’agira de la plus grosse prise de participation privée jamais réalisée dans une entreprise CCUS autonome en Europe.
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Source: www.greenetvert.fr