Le journalLe Monde publiait, le 18 novembre, un article soulignant que «l’ingestion de plastique est un phénomène répandu » chez les espèces marines, à l’issue d’une étude de grande ampleur sur la faune océanique. Selon les chercheurs, même de très faibles quantités de plastique peuvent suffire à tuer tortues, oiseaux ou mammifères marins. Ce constat renforce les alertes déjà formulées sur les effets insidieux et souvent sous-estimés du plastique dans les écosystèmes marins.
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Une contamination massive confirmée par plus de dix mille autopsies
L’enquête dirigée par Ocean Conservancy, en collaboration avec plusieurs instituts de recherche, repose sur l’examen post-mortem de 10 412 individus issus de 95 espèces marines. Elle comprend 1 537 oiseaux, 1 306 tortues et 7 569 mammifères marins. L’ampleur des données permet, pour la première fois, de quantifier précisément l’exposition au plastique dans plusieurs familles d’animaux marins. Les résultats sont édifiants : 47 % des tortues analysées avaient ingéré des fragments plastiques.
Parmi les oiseaux marins, 35 % présentaient des restes de plastique dans leur appareil digestif. Même les mammifères marins ne sont pas épargnés : 12 % d’entre eux en avaient consommé, selon Le Monde. Cette ingestion n’est pas seulement fréquente, elle est également mortelle. L’étude estime que 4,4 % des tortues mortes, 1,6 % des oiseaux et 0,7 % des mammifères sont directement décédés des suites d’une obstruction ou d’une perforation digestive due au plastique. À travers ces données, la pollution par le plastique se révèle comme une cause de mortalité non négligeable, touchant indistinctement toutes les strates de la vie marine.
Des quantités infimes, des risques extrêmes
L’un des constats majeurs de l’étude est la très faible dose nécessaire pour provoquer la mort d’un animal marin. « Pour certaines espèces, l’ingestion de six morceaux deplastique, même de petite taille, suffit à entraîner un risque de décès de 90 % », rapporte Ocean Conservancy. Chez les oiseaux marins comme les macareux moines, quelques fragments de caoutchouc, équivalents à des petits pois, peuvent suffire à bloquer le système digestif. Les chercheurs ont établi des équivalents visuels frappants. Trois morceaux de plastique de la taille de cubes de sucre peuvent être fatals à un oiseau marin. Une tortue caouanne d’environ 90 cm atteint le même seuil létal avec une quantité équivalente à deux balles de baseball. Chez les petits cétacés, un volume équivalent à un ballon de football peut être fatal. Mais ce n’est pas seulement la quantité qui détermine le risque.
Le type de plastique joue également un rôle clé. Les objets en caoutchouc et les plastiques durs sont particulièrement dangereux pour les oiseaux, tandis que les tortues sont davantage exposées aux films plastiques souples et aux fragments rigides issus d’emballages. Chez les mammifères marins, les déchets issus des engins de pêche en plastique représentent une part significative des matériaux ingérés, selon Ocean Conservancy. Ces données attestent que la nocivité du plastique ne dépend pas seulement de sa masse ou de sa densité, mais aussi de sa forme, de sa composition et de sa capacité à provoquer des lésions internes.
Une menace existentielle pour la biodiversité marine
Les implications de ces résultats vont bien au-delà du seul constat écologique. Selon Nicholas Mallos, vice-président de l’ONG Ocean Conservancy, « cette recherche démontre à quel point les plastiques océaniques constituent une menace existentielle pour la diversité de la vie sur notre planète ». Il rappelle que l’ingestion n’est qu’un des multiples vecteurs d’impact du plastique : empoisonnements chimiques, perturbations endocriniennes ou enchevêtrements s’ajoutent à la liste. Il convient également de noter que l’étude ne prend en compte que les macroplastiques, c’est-à-dire les fragments supérieurs à 5 millimètres. Les microplastiques, omniprésents dans l’environnement marin, n’ont pas été inclus dans les analyses, bien que leurs effets à long terme soient jugés préoccupants par la communauté scientifique.
L’ampleur réelle du phénomène pourrait donc être sous-évaluée. Face à ces constats, les auteurs appellent à une série de mesures immédiates : réduction drastique de la production de plastique à usage unique, amélioration des dispositifs de collecte, interdiction ciblée de certains usages à haut risque comme les lâchers de ballons, et intensification des opérations de nettoyage des zones côtières. Ces recommandations visent à réduire l’exposition des animaux marins aux fragments de plastique, dans une logique de prévention.
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Source: www.greenetvert.fr
