Pour que les décisions financières soient l’affaire de toutes et tous
Inflation, tensions politiques et géopolitiques, taux d’intérêt élevés, forte volatilité boursière… Les nuages sont plus nombreux que jamais sur la planète économique et financière. Et les Français semblent assez peu armés pour y voir clair, alors même que les thématiques du pouvoir d’achat et de la préparation de sa retraite sont parmi les grands sujets de préoccupation du moment. La France se situe en effet assez loin sur les classements en matière de culture financière. Selon une enquête de l’OCDE publiée en 2023 le pays se classe seulement 14ème en matière de culture financière des adultes, loin derrière l’Allemagne et la Corée du Sud.
Alors que débute la semaine de l’éducation financière, il s’agit ici d’un véritable enjeu sociétal avec un important coût social, car le manque à gagner pour les ménages est significatif. Une étude d’Allianz menée dans plus de 7 pays révèle qu’en France, cela peut coûter à une personne qui a une culture financière faible jusqu’à 2 390 euros par an de « coût d’opportunité ». Autrement dit, un manque à gagner qui représente près d’un mois de salaire moyen, par rapport à une personne qui a acquis les fondamentaux financiers ! A l’inverse, l’écart est nettement moins significatif entre un épargnant doté de ces connaissances financières de base et un épargnant français bénéficiant d’une culture financière élevée.
En plus d’approfondir les inégalités entre les ménages, le manque de culture financière amplifie surtout les inégalités femmes-hommes. Presque 30 % de femmes ont un faible niveau d’éducation financière, contre 22 % des hommes. Alors même que, à l’école, les filles sont en moyenne de meilleures élèves que les garçons. Les inégalités se construisent donc ailleurs : les femmes pâtissent d’un manque de confiance en elles qui les pénalisent dans leurs choix financiers. De manière générale, elles sont plus nombreuses à répondre « Je ne sais pas » lorsqu’on leur pose des questions de culture financière.
Mais alors, quelles solutions envisager afin d’agir en faveur d’une culture financière pour tous ?
Tout d’abord, il est essentiel que l’École donne plus de place aux fondamentaux mathématiques tout au long de la scolarité pour permettre à chacun d’acquérir des clés de compréhension et donc mieux appréhender l’environnement économique et financier. L’étude des mathématiques développe des compétences cognitives et constitue un socle de connaissances nécessaire pour comprendre les problématiques financières. Démocratiser la culture financière à l’École est aussi indispensable pour apprendre les rudiments de la gestion d’un budget et maîtriser les fondamentaux, comme les taux d’intérêt ou la notion de rendement-risque. Cela peut aussi passer par plus de projets éducatifs à l’image de l’initiative portée par la Fédération bancaire française « J’invite un Banquier dans ma classe », où un professionnel intervient directement auprès des élèves. La proposition du conseil allemand des experts économiques (‘conseil des sages’) de novembre dernier qui consiste à « fournir à chaque enfant, à partir de 6 ans jusqu'à 18 ans, 10 euros par mois sous forme de part dans un fonds », est également une initiative concrète qui pourrait permettre de véhiculer la culture financière dès les premières années.
En outre, les acteurs du secteur financier doivent redoubler d’efforts pour rendre la culture financière accessible. La bonne compréhension financière du client doit dépasser l’approche réglementaire qui prévaut souvent aujourd’hui. Les dispositifs d’informations doivent être adaptés à l’évolution des usages propres à chaque génération. Par exemple, pour les générations Z et Y qui s’informent davantage en ligne et sur les réseaux sociaux, il faut développer plus de dispositifs digitaux pour toucher cette cible. C’est l’engagement d’Allianz France qui a lancé L’Acadé’vie en 2021 en proposant des vidéos et des fiches pédagogiques sur la culture financière, accessibles à tous, gratuites et en ligne.
Enfin, la culture financière n’est pas seulement une question de chiffres. Les initiatives réussies en la matière, en particulier celles qui s’adressent aux femmes et aux jeunes, doivent commencer par renforcer la confiance en soi. C’est un défi sociétal qui doit être relevé collectivement, au niveau du cercle familial, de l’École, des clubs et des associations, et bien sûr des entreprises. Pour que les décisions financières soient l’affaire de toutes et tous, aidons les Français dès leur plus jeune âge à monter en compétences, comme on le fait déjà sur d’autres sujets sociétaux importants tels que la prévention routière ou l’environnement.
Par Marion Dewagenaere, Directrice d'Allianz Patrimoine, Leader de l'écosystème ‘Mon avenir’ et Directrice d'Allianz Banque.
Source: www.linfodurable.fr