Où en est la filière des fleurs françaises ?
Jusqu’à 43 pesticides différents sur un bouquet. C’est ce qu’a découvert Laure Marivain, fleuriste, à la suite du décès de sa fille de 12 ans, emportée par une leucémie. En cause : les substances toxiques auxquelles la jeune femme a été exposée durant sa grossesse. « Jamais personne ne m’a dit que les fleurs avec lesquelles je travaillais avaient été traitées avec des produits toxiques, surtout avec des pesticides interdits qui peuvent nuire à la santé », explique-t-elle à France Inter.
Et pour cause. Contrairement aux fruits et légumes, aucune réglementation européenne ne contrôle les résidus de pesticides présents dans les fleurs. Des pesticides pourtant bien souvent interdits. 85 % des fleurs vendues sur le marché européen proviennent de l’étranger, notamment d’Afrique de l’Est et de Colombie, et sont de véritables « tueuses en puissance », déplore Laure. Pourtant, en 2022 déjà, le ministère de l’Agriculture avait reconnu, dans une réponse écrite au sénateur Jean-Noël Guérini, que « depuis plusieurs années, des études montrent la présence régulière, sur des plantes ornementales, de résidus de substances dont certaines ne sont pas approuvées dans l’UE, à des niveaux parfois élevés ».
"Donner accès à de la fleur locale à tous les fleuristes de France"
L’une des raisons pour lesquelles le marché de la fleur française s’est effondré ces dernières décennies, c’est parce qu’un autre Etat européen est devenu leader : les Pays-Bas qui, avec 60 % de parts du marché, sont les premiers importateurs et exportateurs mondiaux. Une domination qui a fait passer le nombre de fermes florales en France de 8000 dans les années 1980 à 500 aujourd’hui.
Mais des initiatives se développent, d’autant que, depuis la pandémie de Covid-19, les consommateurs réclament davantage de traçabilité et de production française. La production française, c’est la promesse de Fleurs d’ici, une marque de fleurs éthiques et made in France. « Nous nous sommes donné pour mission de donner accès à de la fleur locale à tous les fleuristes de France et pas seulement aux fleuristes parisiens qui eux peuvent aller à Rungis où subsiste un petit carreau de fleurs françaises », explique à France Culture Hortense Harang, la cofondratrice de l’entreprise. « Nous avons récréé une place de marché où l’offre et la demande se rencontrent de façon dématérialisée et digitale, ce qui nous permet d’organiser les flux logistiques de façon optimisée. La fleur française retrouve ainsi de la compétitivité dans le fait de faire circuler des petits volumes sur de petites distances ».
"Un travail d’éducation à faire"
Mais comme l’explique aux Echos Sylvie Robert, déléguée générale d’Excellence végétale, association qui défend les labels et signes de qualités de la filière, il est nécessaire de « relocaliser une partie de la production en France sur des bassins géographiques où ces productions ont des chances d’être compétitives ». Et pour cela, « il faut recréer des réseaux, coordonner les acteurs ». Car à côté du géant néerlandais, la filière française est peu organisée. Et surtout, selon Hortense Harang, il faut aussi que les consommateurs changent leurs habitudes. « Il y a un travail d’éducation à faire. Nombreux sont les consommateurs qui n’ont aucune idée de la saisonnalité des fleurs« .
Néanmoins, la filière de la fleur française commence à relever la tête. Selon le Collectif de la fleur française, depuis 2020, 1 à 2 fermes horticoles se créent chaque semaine. Et la demande est là, comme l’indique aux Echos Tiphaine Turluche, fondatrice des Bottes d’Anémone, dont la clientèle a triplé cette année. Cette entreprise éco-responsable vend « uniquement des fleurs françaises, de saison et issues de fermes florales n’ayant pas recours au forçage végétal, comme l’éclairage artificiel ou le chauffage ».
Pour aller plus loin : « Tout savoir sur l'alimentation bio »
Pour être sûr d’acheter français, des labels existent. C’est notamment le cas du label Fleurs de France qui certifie au consommateur que les fleurs, plantes, arbustes, arbres ou bulbes ont été produits sur le territoire. L’association Excellence végétale a d’ailleurs développé une carte interactive qui recense les plus de 1600 entreprises engagées dans cette démarche de qualité. Un outil efficace pour soutenir le travail des horticulteurs et pépiniéristes français.
Source: www.linfodurable.fr