Depuis le 18 novembre 2025, l’UFC-Que Choisir alerte sur l’explosion des coûts liés à la dépollution de l’eau potable. L’association met en évidence une augmentation importante de la présence de pesticides et de nitrates dans les nappes phréatiques, un recul du taux de conformité des réseaux et une pression financière intenable pour les communes. Dans un contexte écologique déjà tendu, cette situation révèle une crise structurelle : celle d’une ressource vitale fragilisée par des pollutions diffuses persistantes.
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Des nappes en tension, entre pesticides historiques et nitrates agricoles
Les nappes phréatiques françaises restent durablement marquées par l’usage agricole intensif. Les données issues de l’UFC-Que Choisir montrent que plus de 30 % d’entre elles présentent des teneurs préoccupantes en nitrates ou pesticides. Ces pollutions, souvent anciennes, perdurent dans les sols et migrent lentement vers les captages, créant une pression continue sur les systèmes de traitement.
Les collectivités doivent donc traiter des volumes d’eau croissants, parfois très en amont, pour compenser cette dégradation structurelle des milieux. L’enjeu est écologique autant que sanitaire : les captages menacés par des pollutions persistantes nécessitent des techniques d’épuration plus lourdes, plus coûteuses et plus consommatrices d’énergie.
Des technologies de traitement de l'eau potable toujours plus sophistiquées
Pour répondre à ces pollutions diffuses, de nombreuses communes s’équipent de procédés membranaires capables de filtrer les micropolluants et les résidus chimiques. Mais ces technologies sont extrêmement coûteuses : l’UFC-Que Choisir rappelle qu’elles peuvent revenir « jusqu’à quatre fois plus cher » pour une petite collectivité comparé à un système traditionnel.
Ces équipements consomment davantage d’énergie, nécessitent un renouvellement fréquent des filtres et mobilisent des compétences techniques pointues. À l’échelle environnementale, cela pose une question centrale : jusqu’où l’intensification des traitements peut-elle rester compatible avec une gestion durable de la ressource ?
Des coûts astronomiques pour compenser les impacts humains
Les dépenses liées à la dépollution atteignent désormais 13 milliards d’euros par an. Rien que pour traiter pesticides et nitrates, plus de 1 milliard d’euros annuels sont nécessaires. Cette somme traduit l’empreinte environnementale accumulée sur plusieurs décennies.
Ces investissements colossaux financent la modernisation des stations de traitement, les analyses renforcées, les contrôles en continu et la rénovation des infrastructures. Le prix du mètre cube a ainsi augmenté de 16 % en deux ans et demi, une hausse qui reflète directement la complexité croissante des pollutions.
La réforme des redevances : un signal encore insuffisant pour les pollueurs
La réforme de 2025 impose aux acteurs industriels une redevance liée à la pollution non domestique. Ce mécanisme, bien qu’utile, reste limité face à l’ampleur des pollutions agricoles, responsables de la majorité des nitrates et pesticides retrouvés dans les nappes.
Le financement de la dépollution repose donc encore majoritairement sur les consommateurs. D’un point de vue environnemental, cela maintient un paradoxe : ceux qui n’émettent pas les polluants financent ceux qui les produisent. L’UFC-Que Choisir plaide pour une application plus stricte du principe « pollueur-payeur », afin d’inciter les secteurs concernés à réduire la contamination à la source.
Les non-conformités augmentent, sans menace immédiate pour la santé
Le taux de conformité de l’eau potables’établit à 85 % en 2025, contre 95 % en 2021. Ce recul de 10 points reflète une intensification de la surveillance et un abaissement des seuils réglementaires, mais aussi une augmentation réelle des pollutions diffuses. Pour autant, les experts se veulent rassurants : les dépassements restent très éloignés des limites dangereuses pour la santé.
Comme le rappelle Olivier Andrault, chargé de mission alimentation-nutrition à l’UFC-Que Choisir : « Est-ce que je peux continuer à boire mon eau ? La réponse est oui, dans la très grande majorité des cas ».
Un modèle à réinventer pour préserver durablement l'eau potable
La situation actuelle soulève une question fondamentale : la dépollution doit-elle continuer à compenser la pollution, ou faut-il s’attaquer beaucoup plus fortement aux sources ?
Les associations environnementales et certains élus plaident pour :
une réduction drastique des pesticides,
la préservation des zones de captage prioritaires,
la restauration des sols,
la responsabilisation accrue des secteurs polluants,
la révision des modèles agricoles et industriels.
Dans un contexte climatique marqué par la sécheresse et les tensions hydriques, l’enjeu n’est plus seulement sanitaire : il devient écologique et structurel. La dépollution, si elle compense les effets, ne peut suffire à elle seule à restaurer des milieux durablement dégradés.
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Source: www.greenetvert.fr
