Budget : faire des économies sur la transition écologique, « c’est se préparer des dépenses »
Malgré quelques "mesures qui vont dans le bon sens" – taxation rehaussée des billets d'avions et des chaudières à gaz, renforcement du malus automobile ou la présentation d’une inédite stratégie de crédits sur plusieurs années pour la transition -, le compte n’y est pas, explique Morgane Piederrière, responsable plaidoyer de France Nature Environnement.
« Faire des économies sur la transition écologique, c’est faire preuve d’une vision court termiste », juge-t-elle : « le coût de l’inaction représente entre 5 et 25 % du PIB mondial, donc faire des économies là-dessus c’est se préparer des dépenses pour plus tard ».
La nomination début septembre du Premier ministre Michel Barnier, qui a placé sur le même plan « dette écologique » et « dette financière », a pu faire renaître certains espoirs. De courte durée, vu le dérapage budgétaire (déficit public de 6,1% du PIB en 2024) qu’a découvert l’ancien ministre de l’Environnement d’Edouard Balladur (1993-1995) en prenant ses fonctions.
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"Des milliards de coupes budgétaires pour la transition écologique"
Résultat ? "Le gouvernement confirme les milliards de coupes budgétaires pour la transition écologique, ce qui ne fera que renforcer l’ampleur des inondations, canicules et incendies qui coûteront bien plus cher aux Français », tempête Anne Bringault, directrice des Programmes du Réseau Action Climat, coalition comprenant le WWF, Greenpeace et Les Amis de la Terre.
Les associations avaient salué le budget 2024, doté d'une rallonge de 7 milliards d'euros pour la transition. Qui a fait long feu : dès février, le gouvernement en reprenait 2 milliards et un 3e milliard était gelé au printemps.
Continuant la tendance, le budget 2025 prévoit un rabotage des aides à la rénovation thermique (MaPrimeRénov) ou du Fonds vert. Ce dispositif, qui finance les projets écologiques des collectivités depuis 2022, passe de 2,5 milliards d'euros à un milliard.
Les crédits dédiés à l'eau et à la biodiversité sont eux aussi rabotés, de 578 millions à 441 millions d'euros.
Appel aux parlementaires
"Baisser MaPrimeRénov, qui permet pourtant d'économiser des dépenses d'énergie, des émissions de gaz à effet de serre et qui crée de l'emploi, n'a aucun sens", assure Morgane Piederrière. Au contraire, "un plan national de rénovation des bâtiments, c’est 700 millions d’économie par an pour le système de santé, comme l’a montré une étude du collectif Rénovons », souligne-t-elle.
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Le gouvernement vante, lui, une rallonge de 2,8 milliards d'euros des crédits "Écologie, développement et mobilité durables".
Mais cette augmentation "est du fait de la baisse des prix de l'électricité qui pousse mécaniquement à la hausse les dépenses de l'Etat pour l'électricité renouvelable", relativise Damien Demailly, directeur adjoint de l'Institut de l'économie pour le Climat (I4CE).
Le gouvernement "se refuse par ailleurs à aller chercher des ressources financières justes comme la réduction des cadeaux fiscaux au transport aérien », qui bénéficie d’exonérations de TVA sur le kérosène, ajoute Anne Bringault, qui se tourne vers le Parlement.
"Pour que la dette climatique ne vienne pas aggraver la dette budgétaire, nous appelons les parlementaires à renforcer ce texte", lance-t-elle.
Les députés "ont eu une marge d'action importante vu que le gouvernement n'a pas de majorité et qu'il a besoin d'eux", abonde Mme Piederrière.
Au-delà du budget 2025, lebras de fer au Parlement se jouera aussi sur la toute première Stratégie pluriannuelle de financement de la transition écologique et de politique énergétique (SPAFTE), attendue de longue date.
Censée être présentée vendredi mais déjà dévoilée par Le Monde et Contexte, elle affirme que les financements fossiles « devront être divisés par deux d’ici 2030 », 80 % de la baisse étant à trouver avec le déclin des voitures thermiques.
"La publication de cette première édition doit être saluée, elle pose les bases pour bien débattre de la répartition de l'effort d'investissement entre l'Etat, les collectivités locales, les ménages et les entreprises", "mais elle n'est pas convaincante à ce stade", regrette M. Demailly.
Avec AFP.
Source: www.linfodurable.fr