Agriculteurs: Fesneau au front en attendant les réponses d’Attal
Le discret ministre de l'Agriculture Marc Fesneau, monté au front cette semaine face aux manifestations d'une profession qu'il connaît bien, reste critiqué pour sa faiblesse politique supposée et devra se contenter du second rôle: les annonces viendront de Matignon en fin de semaine.
« Le combat qu’elle menait (…) c’est notre combat à tous », a lancé mardi à l’Assemblée Marc Fesneau à propos de l’agricultrice décédée accidentellement sur un barrage dans l’Ariège, où il s’est rendu dans la soirée.
Une manière d'embrasser la cause des agriculteurs, dont les actions s'amplifient contre les charges financières et les normes environnementales jugées trop lourdes, même si sur l'Europe, le ministre refuse comme tout l'exécutif de chercher "des boucs émissaires là où ils ne sont pas toujours, au niveau européen".
Le Premier ministre Gabriel Attal a fustigé mardi les "larmes de crocodile" des oppositions à l'égard des agriculteurs et salué l'"engagement d'une France qui se lève aux aurores" mais c'est bien Marc Fesneau qui a répondu aux nombreuses questions des parlementaires dans l'hémicycle.
Le ministre s'est aussi rendu sur le terrain depuis le week-end. Et c'est lui qui a pris la parole à l'issue de la rencontre entre Gabriel Attal et la puissante FNSEA lundi soir, pour promettre "vite" des réponses.
Jean-Baptiste Moreau, ancien agriculteur et ancien député Renaissance qui a l'oreille d'Emmanuel Macron, loue un ministre "qui va au front". Aller à Pamiers dans l'Ariège, où a eu lieu l'accident, "c'était courageux de sa part".
– "Courroie de transmission" –
Mais il le voit davantage comme une "courroie de transmission" entre les agriculteurs et l'exécutif qu'en soldat de première ligne. Car c'est bien Gabriel Attal qui répondra aux revendications des agriculteurs à l'occasion d'un déplacement jeudi ou vendredi, selon des sources concordantes.
Marc Fesneau a dû aussi manger son chapeau sur le projet de loi sur l'installation de nouveaux agriculteurs, dont il a annoncé le report pour qu'il soit complété par un volet "simplification" du mille-feuille de normes et de réglementations. Les précédents reports de ce texte, moins ambitieux que la "loi d'orientation" promise, avaient agacé les organisations syndicales.
"Il doit sûrement regretter de n'avoir pas été écouté" sur ce texte, privé de plusieurs articles pour faciliter son adoption au Parlement, où la majorité n'est que relative, relève M. Moreau.
Le ministre pâtit en outre de l'aura de son prédécesseur Julien Denormandie, au sein du monde agricole.
"On avait un très bon ministre qui était Julien Denormandie, et on a un nouveau ministre Marc Fesneau qui connait très bien le sujet mais qui a un problème majeur c'est qu'il perd tous ses arbitrages", juge un cacique de la droite.
Le ministre n'a "manifestement pas le poids suffisant face aux enjeux" si le Premier ministre "prend le sujet en main", abonde un dirigeant de la FNSEA.
– "Pompiers" –
"Il n'a certes pas le charisme de Denormandie ou de Le Foll (Stéphane, ministre PS de 2012 à 2017) mais surtout il n'y a pas de vision pour le monde agricole", estime un agriculteur habitué de la rue de Varenne. "Ils ne réagissent qu'en pompiers".
Une source gouvernementale modère les critiques: "avec la FNSEA rares ont été les ministres vraiment adoubés".
Installé à Marchenoir, commune de 600 habitants de la Beauce dont sa famille est originaire, cet amateur de chasse à l'arc dont le nom avait déjà circulé pour l'Agriculture en 2017 et 2019 "s'entend très bien" avec la profession et "connaît le truc par coeur", fait valoir la même source.
Numéro deux du MoDem et fils spirituel de François Bayrou, Marc Fesneau en est le seul représentant au gouvernement à ce stade, de quoi le rendre incontournable. Ancien député et ancien ministre des Relations avec le Parlement (2018-2022), il est aussi apprécié à l'Assemblée au-delà de son groupe.
A Matignon, on assume de le laisser "monter au créneau" et "de ne pas se précipiter, de prendre le temps" d'écouter les syndicats, reçus à Matignon depuis lundi, pour élaborer les réponses. Qui pourraient porter sur le gazole non routier ou les avances de trésorerie.
Source: www.linfodurable.fr